Mécanismes de défense: c’est quoi, au juste?
Voilà une notion dont on a tou.te.s plus ou moins entendu parler, que ce soit dans le cadre d’une thérapie, ou via Mamie Jeanine et son analyse de psychologie de comptoir au sujet du comportement de ses voisins, qu’elle vient par ailleurs de vivement critiquer. Mais de quoi s’agit-il au juste ? Qui les a inventés ? Est-ce que c’est fiable ? Combien y en a-t-il ? Calmez-vous, je vais répondre à toutes vos questions. Ou, en tous cas, je vais tenter de le faire. (Lecture : 3min52)
D’où ça vient ?
À la base, les mécanismes de défense ont été théorisés par ce brave Sigmund Freud dans le cadre de la psychanalyse. D’autres personnes ont ensuite bossé sur le sujet, comme Anna Freud – oui c’est sa fille, lâchez Google – Mélanie Klein, ou encore Laplanche et Pontalis (un duo de psychanalystes et non de comiques, contrairement à ce qu’on serait en droit de s’imaginer).
Tout le monde y a mis son grain de sel, et franchement ça devient hyper chaud de s’y retrouver. Selon le DSM, le manuel de référence pour diagnostiquer les maladies mentales, les mécanismes de défense et les stratégies dites de coping, mises en avant par Lazarus et Folkman (qui sont 2 psychologues et non un groupe de jazz folk), seraient grosso modo la même chose. Le coping, ça couvre globalement tous les biais cognitifs que notre cerveau met en place pour nous protéger, des mécanismes de défense aux distorsions. « Scandale et infamie ! » s’écrient certains, « Génie et évidence », diront d’autres.
Notons par ailleurs que le travail de Freud est, aujourd’hui, largement remis en question, et que le DSM est régulièrement accusé d’être élaboré en collaboration avec les lobbys pharmaceutiques.
Ayant moi-même du mal à m’y retrouver dans ce joli bordel, j’ai décidé de m’appuyer essentiellement, pour la rédaction de cet article, sur le cours « De la psychanalyse à la psychologie de la santé » donné par Madame E. Grebot en 2014/2015 à l’université de Reims. Cela me permet au passage d’activer mon propre mécanisme de défense, car si mes propos se révèlent inexacts, je pourrai toujours la blâmer elle plutôt que de me dire que j’ai mal compris – pas folle la guêpe.
De quoi s’agit-il ?
Bon mais alors on parle de quoi exactement ? Comme je le disais, tou.te.s les psy qui ont travaillé sur le sujet y ont fait leur propre modif, donc je vais tenter de vous donner une définition un peu large. En gros, ce sont des mécanismes automatiques que nous mettons en place sans nous en apercevoir, pour nous protéger. Ok, mais de quoi ? « C’est le Moi qui se protège, sous la pression du Surmoi, de l’angoisse et des exigences pulsionnelles du Ça, ouech », aurait dit Freud tout en faisant le signe de Jul, s’il avait vécu à notre époque. D’autres diront plus simplement que ça sert à nous protéger du stress.
Quand on parle de « stress », en psychologie, on fait généralement référence au sens très large du mot. Il ne s’agit donc pas de ce qu’on ressent avant de passer un examen, mais plutôt de tout ce qui vient perturber notre état « normal ». Est-ce que vivre est un stress ? Oui. Se sentir attaqué verbalement par un autre individu est aussi une forme de stress. Parfois, nous vivons également des situations en apparence anodines, mais qui nous renvoient inconsciemment à d’autres périodes de notre vie, ce qui suscite une pluie d’émotions désagréables et donc, un stress. Autant dire que nous avons beaucoup, beaucoup de raisons de dégainer des mécanismes de défense dans notre quotidien.
Comment ça marche ?
Le but des mécanismes de défense serait donc de nous éviter de souffrir, ni plus ni moins. Ils nous permettent aussi de mieux nous adapter aux autres et à la vie. Il en existe un nombre qui varie suivant les sources et si on y intègre ou non les stratégies de coping. Je ne vais pas vous mentir, ce n’est pas très clair toute cette histoire. Freud les avait organisés en sous-catégories, ce qui continue d’être parfois appliqué, parfois non. Je vous l’avais dit, que c’était un joyeux bordel. Selon mon cours de psychologie, il en existe 13 et demi (vous pourrez trouver « 12 » comme « 17 »).
Je dis « et demi » parce que Freud différenciait « le refoulement » de ses autres petits copains. En gros, notre toute première défense consisterait à balancer à notre inconscient tout ce que nous ne souhaitons pas voir. Si cela échoue, nous aurions alors des actes manqués ou encore des lapsus, une façon pour les infos enfouies de revenir un peu à la surface.
Les autres mécanismes de défense seraient différents. Le refoulement reviendrait à tenter de détruire certains stress, tandis que les autres consisteraient à les modifier pour que cela nous atteigne moins.
Au quotidien, ces mécanismes concernent tout ce qui nous permet de nous protéger et/ou de nous rassurer. Cela peut-être un mantra qu’on se répète (« ça va aller, tout va bien se passer »), un trait de caractère qu’on trouve insupportable chez quelqu’un – alors qu’on se conduit exactement de la même façon… – craindre une situation sans savoir pourquoi, alors qu’en réalité c’est une autre qui nous fait peur ou encore refuser purement et simplement un fait objectif (ce qu’on appelle communément « le déni » car… c’est son nom).
Je vous décris tout ça pêle-mêle, mais l’idée de cet article est d’être une brève introduction. Nous irons plus loin plus tard, et on prendra le temps de mieux comprendre chaque mécanisme. Dans les faits, nous en utilisons généralement plusieurs simultanément, parfois les mêmes et de la même façon, parfois différemment. En prendre conscience nous permet de mieux nous connaitre, de se remettre plus facilement en question et donc d’évoluer.
Je vous propose, dans les mois à venir, de rentrer plus en détails dans la façon dont se manifestent les mécanismes de défense. Je ne suis pas certaine de tous les traiter, et il est possible que je fasse un mix avec les stratégies de coping. L’idée, c’est que vous ayez les moyens de mieux comprendre vos réactions, pas que vous deveniez expert.e.s dans la gestion thérapeutique de ce processus. Je ferai donc sans doute des raccourcis dans un but pédagogique, j’espère que cela vous conviendra.
Alors ? Prêt.e.s à embarquer dans le Bus Magique à la rencontre des mécanismes de défense ?