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Est-ce que l’espoir fait vivre?

Voilà une question hautement philosophique à laquelle je ne vais pas vraiment répondre (quoique) dans cet article, parce que, t’as vu, mon job c’est le coaching et la thérapie, pas la philosophie. Néanmoins, j’ai eu envie de traiter ce sujet comme une dissertation de philo, en suivant le même plan infaillible qui m’a valu 9/20 au bac (je ne vous encourage donc pas me copier si vous passez le bac prochainement). Sans oublier bien sur de citer les sages, parce que c’est important. Lecture: 3min 58

Oui, l’espoir fait vivre

Mais d’abord, qu’est-ce que l’espoir? Partons de la définition du Larousse: l’espoir, c’est attendre avec confiance que quelque chose se réalise. J’ai un peu la sensation qu’il faudrait, idéalement, définir les notions « d’attente » et de « confiance », mais nous serons surement d’accord pour dire qu’on n’a pas le time pour ça. 


Moi je me suis toujours dit que, comme la vie est quand même loin d’être rose H24, n’en déplaise à Edith Piaf, l’espoir est ce qui nous permet de nous accrocher malgré les petits coups de poing métaphoriques qu’on se prend régulièrement dans la figure. Il me semble que, si je suis dans une situation bien pourrie, ce qui me fait tenir c’est l’espoir qu’un jour où l’autre, ça va s’arranger. Je veux dire, si je suis persuadé.e que les meilleurs moments de ma vie sont passés et que tout ce que je vivrai à partir de maintenant sera moins bien, y’a-t-il un intérêt à continuer à vivre? 

La langue française regorge d’ailleurs d’expressions pour nous rappeler « qu’après la pluie le beau temps », que « la roue tourne » et j’en passe. C’est parce que nous avons l’espoir de retrouver l’amour qu’on se relève d’une rupture, parce que nous avons confiance en notre vie future qu’on continue à avancer malgré le décès d’un proche, parce que nous savons que nous pouvons rebondir qu’on se remet à chercher un job après un licenciement…

C’est aussi grâce à l’espoir que nous rêvons, fantasmons toutes les possibilités que le futur a à nous offrir – et ça, ça fait du bien. Comme le chante mélodieusement Roch Voisine dans sa chanson « J’ai l’espoir »: « j’ai l’espoir que ta route croise la mienne ». Il est donc célibataire mais reste persuadé qu’un jour ou l’autre, il croisera l’amour et ça, c’est beau. 

Après cette série d’arguments percutants, il me parait donc clair qu’en effet, l’espoir fait vivre en nous permettant d’entrevoir du positif même dans les pires moments.

Non, l’espoir ne fait pas vivre

Cela dit, il me semble aussi très clair qu’un excès d’espoir peut être excessivement nocif. En effet, si je passe ma vie à espérer que des choses se réalisent mais qu’elles ne se produisent jamais, je risque bien de perdre toute motivation et de finir supra déprimé.e. 

Par exemple, notre ami Roch Voisine chante l’espoir de rencontrer l’amour. Mais comme nous savons qu’Hélène l’a planté « seul sur le sable », il parait évident que son espoir a été comblé avant d’être déchiré en lambeaux, telle une vulgaire brochure Greenpeace qu’on a accepté par politesse avant de rentrer dans le bus et qu’on retrouve au fond de sa poche 6 mois plus tard. 

Le “rêve trop beau” de Roch Voisine

L’espoir, c’est donc aussi parier sur une issue positive quand on est en plein doute. Or si l’issue est négative, les répercussions peuvent être terribles. Le job de nos rêves nous passe sous le nez, notre crush nous explique gentiment que ça serait mieux qu’on reste ami.e.s, un proche décède suite à d’excellents résultats, au grand étonnement du personnel médical… C’est ce que j’appelle personnellement « la cruauté de l’espoir ». 

On est là, tous petits humains que nous sommes, à parier sur le fait que le verre va finir par être à moitié plein, on vit déjà ce moment où tout ira mieux, où tout sera merveilleux. On imagine notre vie aux cotés de notre crush après avoir soigneusement vérifié que nos deux noms de famille sonnent bien quand on les accole, on imagine les barbecues à venir avec nos super nouveaux collègues et le bonheur que va susciter ce poste qu’on a tant de fois fantasmé, on planifie les activités qu’on partagera avec notre proche lorsqu’il ou elle sera guéri.e… Et PAF! La vie écrabouille notre petit coeur et le réduit en miettes. Il me semble – mais je peux me tromper – que sans l’espoir, nous nous laisserions moins aller à rêver et que sans toutes ces attentes que nous nous sommes ainsi créé, la descente serait moins brutale. L’espoir peut donc être cruel et nous rendre plus à même d’être tristes, voire carrément déprimé.e.s.

Enfin, j’aimerais enfoncer le dernier clou de ce parfait argumentaire en citant un poète contemporain. Dans sa chanson « Guedin », Vald déclare en effet:  « Si l’espoir fait vivre, la galère transforme en zombie ». Or, puisque les zombies n’existent pas (encore), nous pouvons affirmer que l’espoir ne fait pas vivre.

L’espoir fait vivre, mais en fait non

C’est déjà l’heure de la synthèse! J’ai l’impression de répéter cette phrase à peu près tout le temps, mais il semble que, comme d’hab, tout soit une question d’équilibre et de juste de milieu. 

Sans espoir, on peut rapidement oublier de dézoomer, et se mettre à penser que notre vie est pourrie, qu’on ne pourra plus jamais enlacer nos proches sans faire un auto-test, que le réchauffement climatique aura notre peau… Cela peut non seulement menacer notre existence à nous, en tant qu’individus, mais aussi notre survie en tant qu’espèce – car à quoi bon avoir des enfants dans un tel contexte? En cela, il me semble qu’on peut dire que oui, l’espoir fait vivre. C’est grâce à lui que nous pouvons nous projeter dans un futur meilleur même si totalement hypothétique. Il nous permet de croire assez en nos rêves les plus fous pour nous donner l’envie et la force d’aller de l’avant malgré les épreuves parsemées sur le grand chemin de la vie. 

Mais à trop se concentrer sur un positif fantasmé, on risque fort de développer une relation toxique avec l’espoir. Allant de déception en déception, de moments de tristesse en rêves détruits, notre moral a toutes les raisons de se faire la malle et d’aller voir ailleurs si on y est. 

Si on résume: un peu d’espoir, c’est cool et nécessaire, mais trop d’espoir tue l’espoir. 

Peut-être qu’on peut, alors, trouver un juste dosage. Cela peut, par exemple, consister à se mettre en action pour augmenter les chances qu’ont nos rêves de se concrétiser, le tout en restant réalistes. On peut aussi se rappeler, quand tout va mal, de prendre un peu de recul et que, comme dirait Bones, « rien n’arrive qu’une seule fois dans l’univers ». Si nous avons été heureux.se un jour, il semble donc que nous ayons de grandes chances de retrouver ce bonheur à un moment ou à un autre. Et puis dans les situations de doute, si nous ne le pouvons, je suis personnellement partisane du « mieux vaut savoir et être fixé.e que d’espérer et risquer d’être profondément déçu.e » – il me semble que ça évite pas mal de montagnes russes émotionnelles, mais « chacun trouve son bonheur où il peut », nous rappelle le film Kuzco avec sagesse.

Enfin, n’y a-t-il pas toujours quelque chose à apprendre, quelque soit la situation? Ne peut-on pas tirer du positif de tout ou presque, une fois qu’on a assez pleuré?

Je veux dire, si Hélène ne s’était pas barrée en laissant derrière elle Roch Voisine, son sable et son rêve trop beau, il n’aurait probablement pas écrit une chanson mythique grâce à laquelle il a pu faire de la moula en masse malgré une musique peu recherchée et des paroles complètement débiles*. Mais qui sait?

* NB: je dis ça en toute bienveillance

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